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Tout ce qui brille attire l’homme, c’est la conclusion d’un article paru il y a quelques années qui soulignait l’attirance naturelle de l’homme pour la brillance (1). Pourquoi ? parce que ce qui brille renvoie à un élément vital : l’eau.
Les mécanismes sous-jacents de la brillance
Sur la base de ces résultats, des investigations complémentaires ont permis de mettre en évidence que la brillance a une fonction bien utile du point de vue du marketing (2). Ainsi, un emballage brillant est plus attirant et fait aimer un produit, mais a aussi des fonctions singulières sur certains mécanismes perceptuels. En se basant sur un cadre développé en psychologie (3), la recherche a permis de mettre en évidence le fait que « voir » une surface suffit à induire naturellement des perceptions tactiles sans avoir à toucher ladite surface. Ainsi, quand un emballage brillant est perçu comme plus fin et plus léger (donc une fonction logistique appréciable pour le consommateur), un emballage mat donne une impression d’épaisseur et de solidité (donc une fonction protectrice). La brillance améliore également la perception de qualité d’un produit. Et surtout, la brillance améliore l’intention d’achat même si le consentement à payer ne varie pas.
En d’autres termes, la brillance a une fonction marketing très intéressante pour faire aimer et faire agir même si cela ne génère pas de marge potentielle supplémentaire.
Une touche de gloss en entreprise ?
Au regard de ces quelques résultats de la recherche, on pourrait déduire qu’une entreprise a tout intérêt à créer des produits et /ou des emballages brillants pour optimiser ses ventes. Mais si l’on se place sous l’angle de l’éthique, gare aux praticiens qui utiliseraient ces mécanismes pour attirer et rendre un produit désirable au risque d’induire le consommateur en erreur sur les caractéristiques réelles de l’emballage ou du produit (sans compter le risque de regret post-achat). De même, au regard de la soutenabilité, plusieurs éléments devraient nuancer les fonctionnalités de la brillance. En premier lieu, il semble nécessaire de s’interroger sur les matériaux qui permettent de créer cette brillance. Ainsi, des matières plastiques – même si elles sont sur le papier recyclables – subissent une perte de qualité à chaque cycle de recyclage qui sont au demeurant en nombre réduit (2 à 3 cycles seulement). Quid des externalités négatives et des pollutions engendrées par une telle utilisation à court ou moyen terme ? En second lieu, est-il réellement pertinent d’utiliser les fonctionnalités de la brillance de l’emballage si celui-ci n’est pas absolument nécessaire ?
Dans une logique soutenable, la question des emballages devrait amener à défaut à en réduire l’usage (4) et à ne le considérer qu’au regard de leur utilité pour des fonctions logistiques pour éviter la casse et donc le gaspillage mais aussi d’usage du produit (contenants pratiques pour en faciliter l’utilisation). Toutefois, la praticité ne doit pas justifier le développement d’emballage à usage unique – qu’ils soient recyclables ou non – et contenant qui plus est de petites pièces. [Notons que la loi AGEC a pour objectif de bannir les emballages à usage unique].
50 nuances de brillance
Si les recherches ont montré les avantages de la brillance pour les emballages, d’autres éléments ne doivent pas passer sous les radars. Ainsi, des recherches récentes ont mis en évidence les effets insidieux d’une autre catégorie de composants brillants : les paillettes. Si elles sont synonymes de fêtes, là encore, il s’agit d’un usage unique. Alors les paillettes : un trouble-fête ?
A long terme les effets des paillettes sur le vivant ne sont pas anodins notamment s’agissant de l’environnement marin. Les paillettes sont d’une taille très réduite, donc difficiles à ne pas disperser. Le danger est plus redoutable lorsqu’elles se décomposent en plus petits composants pour devenir des nanoparticules qui vont s’insinuer partout, dans l’eau mais aussi les sols. Aujourd’hui, leur élimination est techniquement impossible. A cela s’ajoute, leur effet perturbateur lié à leur interaction active avec leur environnement. Ainsi dans l’océan, elles accélèrent la formation de cristaux (indispensables à la formation des coquillages) mais finissent par les fragiliser. En bout de chaîne, ces nanoparticules se retrouvent également dans les tissus des poissons et des fruits de mer qu’un grand nombre de personnes consomme régulièrement. Enfin, en perturbant la formation de certains composés chimiques dans l’océan, elles affectent aussi la manière dont le carbone est capté (5) entraînant des conséquences négatives à une échelle plus large sur le fonctionnement de notre système terre.
Brillance insoutenable
En tant qu’entrepreneur, aligner ses pratiques avec des valeurs soutenables doit amener à une logique intraitable des matériaux permettant de créer cette caractéristique unique si attirante pour l’homme : la brillance. Qui plus est, lorsqu’il s’agit d’éléments à usage unique dont l’utilité est superflue.
Gardons en tête que si la brillance attire elle ne permet toutefois pas d’augmenter le consentement à payer, elle ne génère donc pas de marge supplémentaire. Ainsi, une caractéristique dont les conséquences sur le vivant ne sont pas anodines devrait amener à reconsidérer les pratiques et à chercher des alternatives viables. Eliminer l’usage des paillettes ou de tout matériaux susceptibles de se désagréger sans possibilité de les éliminer de l’environnement est une pratique positive et salutaire.
(1) Meert, K., Pandelaere, M., & Patrick, V. M. (2014). Taking a shine to it: How the preference for glossy stems from an innate need for water. Journal of Consumer Psychology, 24(2), 195-206.
(2) Briand Decré, G., & Cloonan, C. (2019). A touch of gloss: Haptic perception of packaging and consumers’ reactions. Journal of Product & Brand Management, 28(1), 117-132.
(3) Spence, C. (2011). Crossmodal correspondences: A tutorial review. Attention, Perception, & Psychophysics, 73, 971-995.
(4) Briand-Decré g. (2025) Entrepreneuriat Soutenable et Pérenne : Prêt.e à lancer votre histoire à impact ? Pearson
(5) Rodriguez-Blanco J.D. and Zubovic K (2025), La face cachée des paillettes : un poison pour les océans ?, The conversation, https://theconversation.com/la-face-cachee-des-paillettes-un-poison-pour-les-oceans-257255, Zubovic, K. P., Horvath, A., Brien, D. M., Rateau, R., Terribili, L., Winters, S., … & Rodriguez-Blanco, J. D. (2025). Crystallisation of CaCO3 polymorphs induced by layered PET-based microplastic particles. Environmental Sciences Europe, 37(1), 1-18.