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Décroissance, Pas de croissance, Croissance : Quelle posture pour un entrepreneur valeureux ?

L’entrepreneur valeureux est naturellement amené à s’interroger sur la manière de développer son modèle d’affaires [1]. Les débats se multiplient autour des notions de croissance, décroissance [2] ou encore pas de croissance.

Quelles pratiques entrepreneuriales au regard des enjeux climatiques et environnementaux?

Le think tank The Shift Project et les propositions formulées par le GIEC [3] mettent en évidence la nécessité de repenser notre système en adoptant des démarches empreintes de sobriété et résilientes. La réduction des émissions de gaz à effet de serre est une priorité absolue. En 2023, les effets du changement climatique se ressentent d’ores et déjà par des périodes de sécheresse ou de précipitations abondantes à plusieurs points du globe.  Le 6ème rapport du GIEC, communiqué en mars, rappelle que « les activités humaines ont sans équivoque provoqué le réchauffement climatique ». Il est indispensable de revoir nos pratiques pour avoir une chance de contrer des effets délétères sur le changement climatique.

Misez sur la (dé)croissance?

Interrogeons-nous! Quelle orientation est à privilégier compte tenu des enjeux climatiques et environnementaux ? La décroissance est-elle l’unique voie permettant de réduire les impacts de l’activité humaine sur la planète ? Une entreprise qui affiche une croissance nulle emprunte-t-elle une impasse ?

Qu’est-ce que la croissance?

Revenons aux fondamentaux!

  • Afficher un taux de croissance constant à 10% signifie qu’une entreprise A qui produit 100 unités la première année, en produira donc 110 la deuxième année, 121 unités la troisième année et ainsi de suite.
  • Afficher un taux de croissance nul (0%) signifie que l’entreprise B qui produit 100 unités la première année, en produira 100 unités la deuxième année, 100 la troisième année et ainsi de suite.
  • Afficher un taux de croissance négatif de 10% (donc décroissant) signifie que l’entreprise C qui produit 100 unités la première année, produira 90 unités la deuxième année, 81 la troisième année et ainsi de suite jusqu’à atteindre un niveau de production répondant aux objectifs de réduction fixés par le dirigeant.

Quelle est la meilleure option pour une activité soutenable ?

A priori, un entrepreneur valeureux aurait tendance à choisir la troisième option dans une logique de réduction d’impact. Un entrepreneur qui s’interroge mais qui n’est pas prêt à mettre en place un plan de réduction de son activité opterait pour la deuxième option. Un entrepreneur animé par une ambition conventionnelle de développement opterait donc logiquement pour la première option.

Modérer le choix de l’option de croissance selon l’activité entrepreneuriale

Bousculons un peu les fondamentaux! Toutefois, ce n’est pas aussi simple. Un changement trop brutal du modèle d’affaires [1] n’est pas toujours possible (l’endettement, le financement de la masse salariale sont autant de facteurs qui peuvent ralentir les ambitions de l’entrepreneur).  

L’option de l’entreprise C est donc celle qui a priori permet à une entreprise – dont l’impact carbone et les impacts sur les neuf limites planétaires sont importants – de réduire en douceur l’impact de son activité et ainsi limiter son rôle dans le réchauffement climatique et les dégâts irréversibles sur l’environnement. De manière pragmatique, le dirigeant s’interrogerait sur la nécessité d’infléchir sa production dans une logique de réduction programmée. Il initierait également une démarche de conversion d’une partie de son activité en prenant en compte les compétences disponibles en interne et la manière de les mobiliser autrement (la formation continue tout au long de la vie peut aider à amorcer cette démarche de transition).

L’option de l’entreprise B ne doit pas être automatiquement perçue comme une impasse. Retenons que l’entreprise a tout de même produit 300 unités au bout de trois ans, ce qui montre qu’elle sait maintenir le cap. Certains entrepreneurs choisissent le statu quo par choix réfléchi et assumé car cette posture s’inscrit dans une logique de pérennisation de l’entreprise basée sur des valeurs responsables et de solidité. Elle revêt plusieurs avantages comme l’organisation de l’activité autour d’une structure à taille humaine, réduisant les contraintes administratives et les risques liés à des variations potentielles de la taille du marché (donc du nombre de consommateurs potentiels).  Bien évidemment cette option n’est valable au regard de la soutenabilité que si et seulement si le niveau de production constant permet de limiter a minima les impacts de l’entreprise sur l’environnement et le changement climatique.

L’option de l’entreprise A peut a priori sembler contraire à la logique de réduction des impacts. Pourtant elle mérite d’être également considérée de manière stratégique pour certaines formes d’activités. Ce sera le cas des entreprises dites régénératrices de l’environnement produisant plus d’effet positif que d’effet négatif telles que des activités autour de la permaculture, de l’agriculture biologique, de l’agroforesterie, mais aussi des activités autour du bien-être dans une logique de pratiques douces et d’amélioration de la qualité de vie et du ressenti individuel.

En conclusion

Retenons que le développement d’un modèle d’affaires soutenable est conditionné par:

  1. l’activité de l’entreprise
  2. la prise en compte des effets de l’activité entrepreneuriale sur l’environnement, en incluant les effets sur l’humain,
  3. mais également les aspirations du fondateur qui doit ambitionner d’être/de devenir un entrepreneur valeureux!

[1] Le modèle d’affaires est la manière dont l’activité de l’entreprise est organisée pour délivrer de la valeur

[2] Pour revenir sur les fondamentaux de la croissance et de la notion de décroissance, l’ouvrage de Timothée Parrique (2022) Ralentir ou Périr, Editions Du Seuil est un incontournable.

[3] Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat

Article rédigé par Gwenaëlle Briand Decré – Licence CC BY 4.0